Respecter les normes sans perdre en consistance. Gret simplifiés
Les tableaux logiques simplifiés 2 : Des outils pour programmer, suivre, évaluer et présenter ses projets
V. LA PRESENTATION DES DOCUMENTS PROJETS AUX BAILLEURS DE
FONDS
1. Respecter les normes sans perdre en consistance
1.1 Présenter pour convaincre ou décrire pour débattre, puis piloter : deux exercices différents
Ecrire un document de projets pour un bailleur, un exercice forcément très codifié
La plupart des bailleurs de fonds sont des organisations publiques centralisées et hiérarchisées.
Leurs administrations doivent respecter les règles contraignantes de la gestion des fonds publics, destinées notamment à assurer la transparence et l’intégrité de cette gestion. Elles traitent un très grand nombre de dossiers et doivent respecter des critères d’efficience qui aboutissent à des procédés quasi industriels
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. L’Union européenne est la plus importante d’entre elles en volume financier.
Ces contraintes les obligent à édicter des procédures très codifiées et à les imposer à leurs partenaires - bénéficiaires. Les modèles de présentation des demandes de financement font partie de ces procédures.
Ces modèles doivent permettre aux bailleurs de faire examiner ces demandes avec la plus grande efficience possible, en appréciant à la fois les qualités intrinsèques des projets proposés et leur adéquation à leurs propres priorités politiques.
Illustration
L’appel à proposition lancé par la
Commission à l’automne 2001 sur la ligne réservée aux Ong européennes a suscité l’envoi de 970 dossiers.
Chacun devait être envoyé en quatre exemplaires, dans des cartons qui, au total, devaient représenter un volume d’environ 70m
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.
Les documents de projets présentés par les Ong à leurs bailleurs laissent parfois perplexes leurs évaluateurs. Leurs objectifs ne sont pas toujours réalistes, ni cohérents avec les moyens mobilisés. Souvent, ils sont trop peu détaillés pour servir de référence pour piloter l’action, ou plus tard, pour l’évaluer. Une fois leur financement obtenu, les Ong ne s’y réfèrent que très inégalement.
Ces limites traduisent l’ambivalence de ces documents de projets qui répondent, en fait, à plusieurs objectifs différents : convaincre un bailleur, faciliter la relecture du projet par ses partenaires, guider ultérieurement la mise en œuvre avec un minimum de précision.
Les documents destinés aux bailleurs doivent respecter à la lettre les exigences formelles de ces derniers, plan et forma types, vocabulaire « maison », volume normalisé. Les quasi-
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La recherche de l’efficience dans l’instruction des projets incite les bailleurs à préférer les « gros projets »…
Elle aboutit parfois à favoriser des « projets usines à gaz », eux-mêmes peu efficients… Mais les échecs sur le terrain ne portent pas forcément ombrage à « l’efficacité » des services instructeurs.
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formulaires imposés privilégient souvent la pertinence des objectifs du projet au regard des orientations du bailleur, des critères d’efficience et de visibilité. Pour séduire leurs lecteurs, les rédacteurs de ces documents tentent d’inscrire leurs projets dans le plus grand nombre possible des priorités affichées par le bailleur (lutte contre la pauvreté, genre, bonne gouvernance, protection de l’environnement, démocratie, droits de l’homme, sécurité alimentaire, décentralisation, etc.). Ils affichent le maximum d’effets escomptés avec des moyens limités et sur des durées imposées. Ils minimisent les risques de mise en œuvre. Quels que soient les contextes et les capacités initiales des acteurs locaux et la connaissance que l’Ong en a, ils se présentent comme « partenarialement » et « participativement » corrects.
Les supports nécessaires à la prise de décision au sein d’une Ong ou d’un regroupement de partenaires, doivent respecter d’autres critères de formes. Ils doivent
être plus facilement lisibles.
Ils ne font pas référence ni aux mêmes valeurs, ni aux mêmes champs de contraintes.
Les contraintes posées par les bailleurs traduisent aussi des exigences, qui n’ont pas que des conséquences négatives sur les acteurs non gouvernementaux du Nord.
Les exigences de l’Union européenne ont sûrement contribué à un meilleur équilibre des relations entre Ong du Nord et Ong du
Sud.
Ils doivent plutôt expliciter les relations partenariales prévues (ou se référer aux documents qui régissent déjà par ailleurs ces relations). Ils s’attachent plus aux ob-
Son fameux cadre logique tant décrié (et dont il est question ci-après) a aussi contribué à une plus grande rigueur dans la présentation des projets des Ong françaises… jectifs et aux principes d’action des projets qu’aux détails de leur mise en œuvre.
Ce n’était pas toujours leur point fort….
Les documents internes destinés à servir de référence à une équipe se soucient moins des orientations du bailleur et des arguments en faveur de la pertinence du projet (qui sont parfois explicités dans d’autres documents produits lors des phases d’identification et de faisabilité).
Ces documents diffèrent largement d’une organisation à l’autre. Selon leur culture mais aussi leurs domaines d’interventions, elles laissent une plus ou moins grande autonomie « aux terrains », et planifient leurs actions sur des périodes plus ou moins longues. Mais, en général,
Ces documents explicitent mieux (que les documents destinés aux bailleurs) des principes d’action et de pilotage. Ils décrivent plus en détail la mise en œuvre prévue, en se référant parfois aux outils et aux méthodes propres à l’Ong.
Concevoir d’abord, présenter ensuite
Les objectifs contradictoires de ces trois types de documents ne sont pas toujours faciles à concilier. Quel que soit le compromis final entre la contrainte « commerciale » et la nécessité d’un minimum de rigueur, il nous semble préférable :
> de commencer par écrire son projet sans trop se préoccuper de sa présentation pour le bailleur, en étant d’abord attentif à sa cohérence (ce qui implique de prendre en compte certaines contraintes de financement et des éléments de la logique du bailleur auquel on compte s’adresser) ;
> de « traduire » ensuite, seulement dans un deuxième temps, ce premier draft en « langage bailleur. »
« Voilà bien un conseil de consultant ! » s’exclameront les lecteurs qui ont déjà sué sang et eau pour écrire un document projet destiné à un (ou plusieurs) bailleur(s) ; « le bougre, il nous
recommande de multiplier notre travail par deux pour arriver à peu près au même résultat.
On voit bien que ce n’est pas lui qui s’y colle ! Il n’a jamais répondu à un appel à proposi-
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