Christian Lassure
La pierre sèche,
mode d’emploi
Deuxième tirage 2012 avec nouvelle présentation
© Groupe Eyrolles, 2008, 2012
À l’occasion de son deuxième tirage cet ouvrage bénéficie d’une nouvelle couverture. Le texte et les
illustrations restent inchangés.
ISBN : 978-2-212-13453-7
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II
Remonter un mur de soutènement / La préparation du chantier
La préparation du chantier
Stabilité et principes de dimensionnement
de la terrasse
Une terrasse à mur de soutènement en pierres sèches est un dispositif constitué :
• en amont, d’un massif de terre à la surface horizontale ou faiblement inclinée ;
• en aval, d’un mur de pierres sèches soutenant ce massif.
Un tel dispositif obéit par conséquent :
• aux règles de stabilité des sols ;
• aux principes de dimensionnement des murs en pierres sèches.
■
Brèche donnant la coupe d’un mur
de soutènement en grès : de droite
à gauche, le parement du mur
formé de boutisses, le drain
constitué de pierraille, la terre
mêlée de cailloux ou d’esquilles.
Stabilité du massif de terre
Plus le massif de terre en aval du mur de soutènement est hydraté
et se rapproche de l’état liquide, plus sa résistance au cisaillement
(et donc au glissement par rapport au talus sous-jacent resté à l’état
solide) diminue. De même, plus le massif de terre est saturé d’eau,
plus son poids augmente et plus la poussée sur le mur de soutènement s’accroît (il faut savoir que le poids d’un sol argileux, qui est
seulement de 2 500 kg/m3 lorsqu’il est ressué, passe à 3 000 kg/m3
lorsqu’il est saturé d’eau).
Enfin, plus le massif de terre est hydraté, plus il se dilate, ce qui
accroît encore la poussée exercée sur l’ouvrage de soutènement
(on saura qu’un remblai horizontal totalement saturé d’eau pousse
environ 2,5 fois plus que le même remblai sec).
La maîtrise des eaux excédentaires en amont du soutènement
s’avère donc indispensable pour éviter la déstabilisation de la masse
de terre et la destruction du soutènement. On trouve donc un dispositif d’évacuation des eaux excédentaires consistant :
• tout d’abord en un drain ménagé entre la face interne du mur et
la face soutenue, formé de cailloutis et de pierraille impropres à
la confection du mur ;
• ensuite en deux petits chenaux, disposés l’un en amont du soutènement, l’autre en aval de ce dernier ;
• enfin en chantepleures réservées à intervalles réguliers dans
l’épaisseur du mur dans sa partie inférieure.
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La préparation du chantier
■
Stabilité du mur de soutènement
Un mur de soutènement doit résister à la poussée oblique
exercée par les terres qu’il soutient.
Cette poussée (Fs) est la résultante d’une composante horizontale (Fsh) et d’une composante verticale (Fsv).
Le mur oppose à cette poussée son poids (P) mais aussi,
d’une part, la force de butée horizontale (Fb) s’exerçant en
aval contre ses fondations et, d’autre part, la réaction du
sol sous ces dernières.
En simplifiant, on peut assimiler un mur de soutènement à
une équerre verticale soutenant les livres d’un rayonnage
de bibliothèque. Sans le poids de l’équerre, les livres se
renverseraient d’un même côté. Le mur résiste donc principalement par son poids à la poussée de la terre.
Domaine Schlumberger dans les Vosges :
deux maçons remontent un mur de
soutènement en assise de gros blocs.
Fsh
Fs
Fsv
P
Fb
R
P : poids du mur
Fs : résultante de la force de poussée du substrat
Fsh : composante horizontale de la force de poussée du substrat
Fsv : composante verticale de la force de poussée du substrat
Fb : force de butée
R : réaction du sol sous la base du mur
Règles de stabilité d’un mur de soutènement à double parement.
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II
Remonter un mur de soutènement / La préparation du chantier
Un échafaudage est-il utile ?
Le recours à un échafaudage ne se justifie que pour des murs de
soutènement dont la hauteur dépasse 1,5 m car le bâtisseur doit
pouvoir accéder sans difficulté à la partie arrière du mur, pour bien
y caler les pierres, mais surtout il lui faut pouvoir hisser les pierres
à la hauteur désirée.
Cependant, pour s’éviter des efforts inutiles, on a le loisir de bâtir
un succédané d’échafaudage : deux piles de gros blocs supportant
de grosses planches. Les pierres pourront être posées sur ce plateau
mais sans constituer une gêne pour les allées et venues du bâtisseur.
Toute surcharge sera bien entendu évitée.
Dernier point, on peut toujours marcher sur le dessus du mur au
fur et à mesure qu’il monte et par la même occasion vérifier que
les pierres, bien calées, ne branlent pas.
De quels outils se munir ?
Pioche
Pour remonter la partie éboulée d’un mur de soutènement, il n’est
pas nécessaire d’avoir tous les outils requis pour l’édification d’un
mur indépendant : feront l’affaire pioche, pelle, cordeau, marteautêtu, seaux et éventuellement râteau.
Pelle
Comment déblayer la partie écroulée ?
Pour pouvoir remonter une brèche qui s’est ouverte dans un mur
de soutènement, il faut tout d’abord déblayer le cône de pierres
et de terre qui en interdit l’accès, puis creuser à l’emplacement de
la brèche et en arrière de celle-ci (de façon à obtenir un espace
suffisant pour le futur drain de cailloux et de gravier) et en retirer
terre et racines.
Marteau-têtu
Cordeau
Râteau
Seau
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La préparation du chantier
Selon leur composition, les terres extraites
du cône de déjection et de l’ancien drain
seront affectées à des usages différents :
• la terre collante (la terre argileuse) provenant du drain, sera évacuée et répandue
ailleurs ;
• la terre végétale (la bonne terre) provenant
des couches de surface sera tamisée et mise
de côté pour la planche en amont.
Quant aux pierres, elles seront enlevées et
entreposées en aval, en prenant soin de les
ranger soit par ordre de grosseur décroissante
en s’éloignant du mur, soit selon leur fonction dans le mur
(boutisses traversantes, pierres de couronnement, pierres de
maçonnerie intérieure, pierres de drain, pierres de calage).
Les pierres éboulées ont été retirées
et mises en tas en aval du chantier
en vue de leur remploi.
Comment nettoyer la brèche ?
Pour pouvoir travailler en toute sécurité, il est important
de retirer des flancs de la brèche et du couronnement (s’il
existe) les pierres qui sont en position instable et risquent de
tomber. En particulier, on retirera les pierres de couronnement sur 60 cm au moins de chaque côté de la brèche.
Comment établir la cause
de l’effondrement ?
La majeure partie des brèches survenant dans les murs de
soutènement ont pour origine des mouvements de la partie
inférieure de ces murs (gonflement du parement, déchaussement de pierres) et surtout de l’assise de fondation.
Il est donc plus prudent de dégager celle-ci complètement
pour vérifier que les pierres soient bien alignées, qu’elles ne
bougent pas quand on monte dessus et qu’elles soient inclinées légèrement vers l’amont (si elles étaient inclinées en
sens inverse, les assises au-dessus tendraient à glisser vers
l’aval).
Le mur « fait ventre ».
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